Le 17 mars, le parlement angolais a autorisé le déploiement d’un contingent de 500 militaires au Nord-Kivu, province en proie à de violents conflits opposant les Forces armées de la RDC et le Mouvement du 23 mars (M23) soutenu par le Rwanda. Cette province accueille déjà les troupes burundaises et kényanes de la Force régionale de la Communauté Est-Africaine (EACRF), en plus des contingents ougandais et sud-soudanais attendus. Cette décision consacre une évolution dans le rôle joué par l’Angola dont le président, Joao Lourenço, assume la mission de médiation dans la crise du M23, mission qui lui a été confiée l’année dernière par l’Union africaine.
Cette initiative pourrait-elle changer la donne sécuritaire sur un terrain où s’enlise la force régionale de la Communauté d’Afrique de l’est (EAC) ?
Bonjour et bienvenue dans ce 11e épisode de la saison 3 de Po Na GEC, capsule audio du Groupe d’étude sur le Congo, un centre de recherche de l’Université de New-York, et d’Ebuteli, son partenaire de recherche en RDC, qui tente d’éclairer l’actualité en RDC. Je suis Agenonga Chober, chercheur principal pour les Uélé à Ebuteli.
Nous sommes le vendredi 24 mars 2023.
Depuis avril 2022, la gestion politique et militaire de la crise sécuritaire liée à la résurgence du M23 et à l’activisme des groupes armés actifs à l’Est de la RDC a été assurée par l’EAC.
Parallèlement au processus mené par cette organisation régionale, l’UA a désigné le président Joao Lourenço comme médiateur régional de la crise du M23. Bien que des accords de paix aient été signés sous sa médiation, ils n’ont presque pas connu un début d’application.
À titre d’exemple, la feuille de route de Luanda du 23 novembre 2022 que d’aucuns considèrent comme un plan de paix pour l’Est du pays, n’a pas été respectée par le M23. Ce document prévoyait un cessez-le-feu dès le 25 novembre 2022 ; le retrait du M23 vers sa position initiale du mont Sabinyo à partir du 27 novembre ; et la reddition des armes et le cantonnement de tous les groupes armés y compris le M23, le 30 novembre.
À l’instar d’autres résolutions des chefs d’Etat de la région, cette feuille de route n’a pas été respectée par le M23, et la force de l’EAC censée veiller à sa mise en œuvre y a assisté impuissante.
Le gouvernement congolais n’a pas caché son mécontentement à l’égard de l’EAC et, le 18 janvier, les mouvements citoyens ont organisé une manifestation de colère contre cette force régionale à Goma.
Le 6 février, le président congolais, Félix Tshisekedi a entamé une tournée auprès des pays membres de la SADC tels que l’Angola et l’Afrique du Sud comme pour trouver des alliés alternatifs à l’EAC et à son laxisme.
Peut-on conclure que le président congolais aurait convaincu son homologue angolais de s’impliquer militairement dans la résolution de la crise du M23 ? Rien n’est moins sûr. Cependant, le fait pour Kinshasa d’accepter le déploiement du contingent angolais suggère un arrangement diplomatique.
Mais quel est l’enjeu réel de l’implication militaire de l’Angola dans la résolution de la crise du M23 ? À en croire le général Francisco Furtado, ministre d’État et de la maison de sécurité de l’Angola, ce contingent aura pour mission « uniquement de superviser le processus de dissolution, de désarmement et de réintégration des forces du M23 » .
Est-il possible de dissoudre un mouvement militaire comme le M23 sans un mandat offensif ? La convergence des discours des gouvernements de Luanda et Kinshasa semble confirmer l’hypothèse d’un pas vers une alliance. En témoigne le point de presse du 13 mars tenu par Christophe Lutundula, le chef de la diplomatie congolaise, lors duquel il indiquait que la mission du contingent angolais était « de vérifier si le M23 respecte le principe de cantonnement sécurisé tel que décidé par le mini-sommet d’Addis-Abeba ».
Sans une capacité coercitive, l’intervention militaire angolaise risque toutefois de ne pas changer grand-chose sur le terrain. Il s’agirait par contre d’une superposition de forces sur celles de l’EAC qui ont déjà montré leurs faiblesses devant les caméras du monde entier. Il faudrait clairement choisir entre la puissance de feu contre le M23 ou un dialogue politique direct entre ce mouvement et Kinshasa pour sortir de cette zone de turbulences.
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