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Politique nationale
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Une transition sans Tshisekedi, est-ce possible ?

À moins de 14 mois des élections prévues en 2023, des voix s’élèvent pour appeler à une transition sans Tshisekedi, au cas où les scrutins seraient retardés ou reportés de quelques mois. Mais est-ce possible et souhaitable de mettre en place une transition sans le président Félix Tshisekedi ? 

Bonjour,  

Je m’appelle Ange Makadi Ngoy.  Je suis chercheuse à Ebuteli, partenaire de recherche du Groupe d’étude sur le Congo (GEC). Vous écoutez le 36e épisode de la saison 2 de Po Na GEC, capsule audio qui donne notre point de vue sur une question d’actualité en RDC. Nous sommes le vendredi 4 novembre 2022.

Alors que le calendrier pour les prochaines élections est toujours attendu,  le processus électoral semble mal embarqué et la situation sécuritaire se dégrade davantage. Face à cette incertitude  sur l’avenir du processus électoral, l’idée d’une transition sans Tshisekedi, à l’expiration du mandat constitutionnel de ce dernier, commence à alimenter le débat. Certains militants de la société civile, notamment Bienvenu Matumo, se positionnent déjà pour un départ du président Tshisekedi en cas d’un retard dans la tenue des élections prévues fin 2023. Martin Fayulu, président de l’ÉCiDé, parti de l’opposition, a aussi pris position dans ce sens. « Le président de la République est élu pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois », a-t-il rappelé, en faisant référence à l’article 70 de la Constitution, lors de son passage sur les antennes de RFI et France 24. Il a précisé d’ailleurs  que « cinq ans, ce n’est pas cinq ans et une seconde ». 

Alors, en cas d’une transition sans Tshisekedi, qui va diriger le pays ?

Fayulu évoque deux hypothèses. Premièrement, la vacance doit être assurée par le président du Sénat pour organiser les élections. Il fonde son argumentaire dans sa lecture de l’article 75 de la Constitution qui stipule qu’« en cas de vacance pour cause de décès, de démission ou pour toute autre cause d’empêchement définitif, les fonctions de président de la République (…) sont provisoirement exercées par le président du Sénat ». La deuxième hypothèse renvoie à la désignation d’une personnalité « neutre » pour conduire la transition. 

Mais cette idée de transition sans Tshisekedi est sujette à plusieurs divergences et interprétations. Ce n’est pas nouveau en RDC d’exiger une transition sans le chef de l’État, à la fin de son mandat. On se souviendra qu’en 2017, alors que les signaux étaient au rouge pour la tenue des élections, déjà retardé d’un an, l’idée d’une transition sans Kabila avait vite émergé. Elle était soutenue par les organisations politiques et de la société civile, notamment  le Rassemblement des forces acquises au changement et son président Félix Tshisekedi, aujourd’hui à la tête du pays. 

Mais bien avant, la Cour constitutionnelle, saisie par une  requête en interprétation de l’article 70 alinéa 2 au sujet de la fin du mandat présidentiel, avait rendu son arrêt en stipulant que « suivant le principe de la continuité de l’État et pour éviter le vide à la tête de l’État, le président actuel reste en fonctions jusqu’à l’installation du nouveau président élu ». 

Aujourd’hui encore, nous risquons d’assister à un éternel recommencement de ce schéma politique, à la seule différence que le parti qui est aujourd’hui au pouvoir a été à la lutte pour la transition sans Kabila. Parmi ceux qui sont aujourd’hui à l’opposition, certains étaient dans l’ancienne majorité présidentielle pour défendre une impossible transition sans Kabila avant la tenue des élections.

Si la première option, celle qui soutient la vacance du pouvoir si les élections ne sont pas organisées dans les délais, est sujette encore à des interprétations des uns et des autres, la seconde, qui appelle à un consensus autour d’une personnalité pour diriger le pays, est extra constitutionnelle. Aucune ligne de la Loi fondamentale ne prévoit un tel scénario. La démarche ressemble plus à de la surenchère politique. Et elle risque d’ouvrir la place à des négociations, comme dans le passé, entre le pouvoir et l’opposition qui vont aboutir, comme en 2016 et 2017, à des accords politiques et aux partages des postes gouvernementaux. 

En attendant la suite, vous pouvez recevoir Po Na GEC chaque vendredi sur votre téléphone en envoyant le mot « GEC » ou « Ebuteli » au + 243 894 110 542. À bientôt.

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