Depuis le déploiement des contingents de la force régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) dans le petit-nord de la province du Nord-Kivu au mois de février 2023, il y a eu très peu d’affrontements directs entre les Forces armées de la RDC (FARDC) et le Mouvement du 23 mars (M23).
Mais cela ne veut pas dire que le conflit est à l’arrêt. Désormais, l’essentiel des combats a lieu entre les rebelles du M23 et d’autres groupes armés.
Pourquoi ce choix tactique ?
Bonjour et bienvenue dans ce 31e épisode de la saison 3 de Po Na GEC, capsule audio du Groupe d’étude sur le Congo (GEC) et d’Ebuteli institut congolais de recherche sur la politique, la gouvernance et la violence, qui tente chaque semaine d’éclairer un sujet d’actualité en RDC. Je suis Henry-Pacifique Mayala, coordonnateur du Baromètre sécuritaire du Kivu (KST). Nous sommes le vendredi 11 août 2023.
Depuis le mois d’avril, le M23 concentre la majorité de ses troupes dans les chefferies de Bwito et Bashali à plus de 70 kilomètres au nord-ouest de la ville de Goma, près des territoires de Walikale et Lubero. Cette zone apparaît comme un nouvel épicentre de violences alimentées par le M23. Sa principale position est établie à Kibarizo, dans le territoire de Masisi. À 4 heures de marche de là, à Miyanja, les FDLR ont récemment établi un de leurs nouveaux bastions.
Le plus récent incident est survenu le matin du dimanche 6 août lorsque les combattants M23 ont attaqué le village de Katsuba en encerclant les sous villages de Marangara et Runzenze dans la chefferie de Bwito où ils ont tué onze personnes dont neuf civils et deux combattants FDLR.
Cette nouvelle dynamique semble démontrer que la principale cible du M23 est désormais les FDLR, et les groupes armés alliés issus de la communauté hutu. Depuis le déploiement des forces de l’EAC en février, le KST a documenté au moins 42 attaques lancées par le M23 contre des Nyatura CMC tandis que les groupes armés hostiles au M23 l’ont attaqué à 23 reprises. Au total, au moins 111 civils ont été tués dans la zone.
Pourquoi ce revirement dans les dynamiques de conflit à l’est de la RDC ?
Alors que les confrontations directes entre les FARDC et le M23 sont très peu envisageables, au moins pour l’instant, du fait de l’interposition de la force régionale de l’EAC, le conflit semble se poursuivre entre groupes armés.
Ceci interpelle sur la pertinence du mandat et l’efficacité des forces de l’EAC dans la résolution de ce conflit.
Il est possible que le M23 mène cette campagne contre les FDLR et ses alliés à la demande de son parrain rwandais.
On peut aussi se demander si, en l’absence de perspective de règlement politique du conflit, le M23 n’a pas pris le parti de défendre directement ses intérêts.
À l’instar de Miyanja, plusieurs autres villages proches des zones de déploiement du M23 revêtent une importance historique pour la communauté tutsie qui y a vécu. Certains des réfugiés tutsis congolais actuellement au Rwanda affirment être originaire de cette zone. Si leur retour était envisagé, ils pourraient vouloir y revenir, dans le cas où les FDLR en seraient chassés.
La réponse exacte à ces questions demeure dans la tête de Sultani Makenga, le chef militaire de cette rébellion.
En attendant la suite, vous pouvez recevoir Po Na GEC sur votre téléphone, chaque vendredi, en envoyant « GEC » ou « Ebuteli » au +243 894 110 542. À la semaine prochaine.