Le 16 septembre, le général Peter Cirimwami a été nommé gouverneur intérimaire du Nord-Kivu. Cette décision est intervenue après le rappel à Kinshasa du général Constant Ndima qui occupait ce poste depuis plus de deux ans. Comment comprendre cette nomination au moment où une décision du président de la République est attendue sur une possible levée de l’état de siège ?
Bonjour et bienvenue dans ce 38e épisode de la saison 3 de Po Na GEC, la capsule audio du Groupe d’étude sur le Congo (GEC), centre de recherche de l’Université de New-York, et d’Ebuteli, son partenaire de recherche en RDC. Je suis Reagan Miviri, analyste sur la violence à Ebuteli.
Deux raisons peuvent expliquer la nomination d’un nouveau gouverneur au Nord-Kivu : le massacre de plus de cinquante civils par les militaires à Goma le 30 août dernier et la volonté de donner un nouveau souffle aux opérations militaires.
En effet, avec le tollé qu’a suscité le massacre, il était politiquement risqué de maintenir le gouverneur Ndima à son poste. Il a été rappelé à Kinshasa à l’issue de l’enquête menée à Goma par la délégation conduite par le ministre de l’intérieur, Peter Kazadi. Sa possible responsabilité dans cet événement a été mentionnée pendant ladite enquête . En plus d’être gouverneur, il était en charge des opérations militaires au Nord-Kivu. Dans le procès en flagrance sur la tuerie qui se poursuit devant le tribunal militaire et la cour militaire du Nord-Kivu, certaines parties ont demandé sa comparution en tant que témoin ou renseignant à défaut de le voir comparaître comme prévenu.
Pour éviter un vide à la tête de la province, le gouvernement avait deux options : soit un intérim assuré par le vice-gouverneur policier, aux côtés de qui il aurait fallu nommer un militaire chef des opérations. Soit nommer un nouveau gouverneur militaire cumulant la fonction administrative et les opérations militaires. La première option a été envisagée avec la nomination du général Ychaligonza à la tête des opérations. Cependant, le gouvernement ne semblait pas satisfait..
C’est finalement le général Peter Cirimwami qui a été nommé gouverneur militaire ad interim. Cet officier supérieur originaire du Sud-Kivu a commandé plusieurs opérations au Nord-Kivu depuis des années. Il était notamment commandant des Opérations Sokola I contre les ADF. Il a aussi combattu le M23 en 2012 et lors de la prise de Bunagana en 2022.
L’une des premières actions du nouveau gouverneur a été de se rendre sur la ligne de front vers Kibumba puis à Mushaki dans le territoire de Masisi d’où il a annoncé le redéploiement des Forces armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) dans cette zone, où elles n’étaient plus présentes depuis le cessez-le-feu de février et l’arrivée du contingent burundais de la force régionale. De retour à Mushaki, les FARDC n’ont pas encore été impliquées dans des affrontements. Cependant, le M23 n’est pas loin et les risques d’accrochages ont augmenté.
Le gouverneur Cirimwami a, de plus, réuni les leaders de plusieurs groupes armés à Mubambiro. Officiellement, il les a appelés à rejoindre le programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (P-DDRCS). Néanmoins ces mêmes groupes ont combattu aux côtés des FARDC contre le M23 et l’armée rwandaise. Cela rend leur démobilisation incertaine tant que ce conflit est en cours.
Au final, une reprise des affrontements directs entre FARDC et M23 paraît de plus en plus probable. Dans son discours à l’assemblée générale des Nations unies, le président Tshisekedi a écarté toute possibilité de dialoguer avec le M23. Ce mouvement rebelle pourrait essayer de perturber le déroulement des élections pour se faire entendre. Le ministre des Affaires étrangères a enfoncé le clou : si le M23 ne quitte pas Bunagana pour se pré-cantonner, il y aura des actions militaires, a-t-il affirmé.
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